Monsieur le Maire,
Vous venez de démontrer par les faits que vos paroles ne concernent pas vos actes. Pensez-vous sincèrement que les Tunisiens que vous venez d’expulser brutalement du lieu de vie qu’ils s’étaient choisi, 51 avenue Bolivar, soient plus en sécurité là où vous venez de les reconduire : dans la rue à la merci des rafles « minables », selon vos propres termes, de la police de Mr. Guéant ? L’immeuble que vous qualifiez de « nullement conçu pour servir d’hébergement » à pourtant servi, durant 3 jours et 3 nuits, de refuge pour 300 Sans-papiers tunisiens. Si vous étiez réellement préoccupé des conditions d’hébergement et des normes de sécurité de cet immeuble qui souffrait d’un arrêté de péril, vous auriez tout simplement pu y engager sur-le-champ des travaux, comme le prévoit ce type de décision administrative. Doit-on vous rappeler, vous qui vous prétendez le « premier Tunisien de France », qu’en Tunisie vos compatriotes hébergent des centaines de milliers de Libyens dans un contexte de guerre, d’insécurité et de précarité inouïe ? Ici, loin de vos belles phrases plates, vous vous cachez derrière un arrêté de péril, et votre hospitalité en pratique se limite à renvoyer vos « compatriotes » dans la nature. Peut-être seront-ils plus en sécurité, selon vous, Monsieur le Maire, dans les parcs et les squares où ils se font pourchasser, tabasser, et arrêter chaque soir par une police toujours plus violente et raciste? Car la situation actuelle, dans laquelle vous n’assumez aucune de vos responsabilités, est bel et bien grave. Depuis plusieurs jours, de nombreux Tunisiens ont fini à l’hôpital après avoir été roués de coups par la police ; des déploiements de milliers de CRS menaçants constituent le quotidien de vos habitants sur tout le long de l’avenue Jean-Jaurès ou autour des squares de Belleville et des Buttes-Chaumont.
Pouvez-vous prétendre être sincère monsieur le Maire, lorsque vous parlez d’accueillir ces plusieurs milliers de Tunisiens qui errent en ce moment dans la Capitale alors que vous ne proposez aucune solution de logement sérieuse par apport à ce nombre sur une durée qui ne dépasse jamais un mois ? Êtes-vous bien fidèle à vos paroles lorsque vous faites référence au conflit Libyen qui dure depuis 2 mois dans lequel les Tunisiens accueillent bien plus de monde dans des conditions déplorables et sans aucun moyen ?
Monsieur le Maire, peut-être faut-il surtout rappeler les faits, que vous évitez soigneusement dans ce communiqué mensonger. Il n’a jamais été question des « 112 places d’hôtels actuellement proposées par France Terre d’Asile » dans vos négociations avec le Collectif des Tunisiens de Lampedusa à Paris qui occupaient le 51 avenue Bolivar. Ces places ont été proposées par le biais de cette association à d’autres sans papiers réfugiés dans le parc situé Porte de la Villette. De plus, dans ces négociations, le 3 mai au matin, les 100 autres places dans le foyer Aurore avaient été acceptées par le Collectif dans la mesure où les 100 autres Tunisiens présents au 51 Avenue Bolivar auraient aussi une solution de relogement le même jour. Les Tunisiens ont appris après les négociations que le foyer Aurore n’était pas ouvert la journée – les représentants de la mairie avaient prétendu le contraire dans les négociations-, et qu’ils allaient devoir errer le long des boutiques de luxe du faubourg St-Honoré (8ème arrondissement) à quelques rues de l’Élysée. En sécurité, vous diriez-nous encore ? Qu’en aurait pensé messieurs les superflics Sarkozy et Guéant, eux-mêmes habitués du quartier ? Vos représentants ont tenté une énième pirouette le 3 mai en fin d’après midi en venant affirmer que le foyer serait exceptionnellement ouvert de jour pendant 24 heures. Toutes les conditions de la négociation ayant été bafouées par la mairie, le Collectif à finit par décider de rester au 51 avenue Bolivar. Quant aux mystérieuses 40 autres petites places mentionnées dans votre communiqué – ils sont des centaines, des milliers, Monsieur le Maire ! –qui pouvaient être « ponctuellement ouvertes », il n’en a jamais été de question dans les négociations. Il était légitime que la moitié des Sans-papiers ne laisse pas l’autre à la rue, une petite leçon de solidarité que tous nos concitoyens français peuvent méditer, et vous le premier. De plus, le 3 mai au soir, une autre centaine de Sans-papiers étaient venus à leur tour se réfugier, se reposer, dormir enfin sur un matelas avec un duvet, boire, manger dans cet immeuble flambant neuf aux peintures plus aux normes selon l’arrêté de péril.
Ce soir du 3 mai 2011, Avenue Bolivar, près de deux cents habitants, salariés, chômeurs, étudiants, militants, syndicalistes ou simples citoyens étaient venus se rassembler avec les Sans-papiers pour soutenir cette occupation. Votre obscure accusation de difficile « prise de contact » avec les ressortissants tunisiens par la faute de « la présence de collectifs militants anarchistes ou radicaux » ne fait que souligner votre profond éloignement avec la population locale parisienne qui était pourtant venue mettre en pratique vos belles paroles. Les représentants de la mairie ont discuté directement avec le Collectif des Tunisiens de Lampedusa à Paris, composé exclusivement de Tunisiens sans papiers. Malgré les tentatives de déstabilisation d’Omeyya Seddik, sinistre personnage membre du PDP en France – parti de droite libérale et premier à se jeter dans les bras du gouvernement de transition constitué des anciens du RCD Benaliste –, présent dans l’occupation tout en étant contre, qui négociait illégitimement avec la mairie au nom du Collectif, les Tunisiens sans-papiers ont pris toutes les décisions eux-mêmes. L’intégriste nationaliste que la mairie avait envoyé pour encourager les jeunes Tunisiens sans papiers à aller dans le foyer Aurore, est reparti avec le bus, et les autres représentants de la mairie, sous les huées. L’arrière pensée malsaine qui prenait encore les Tunisiens pour une bande de crétins susceptibles d’écouter le premier prêcheur de bas étage s’est vue ridiculisée comme rarement.
Les Parisiens qui sont venus à l’aide du Collectif ne sont intervenus que d’une façon matérielle. Et il est bien normal que les Jeunes Chômeurs Diplômés Tunisiens aient établi des liens avec leurs camarades précaires français. Le jeune intellectuel Azyz Amami vous avait même fait part de ces liens lors d’une de vos visites en Tunisie. Peut-être avez-vous oublié ce petit détail d’une grande importance lors de vos promenades sur les luxueuses plages de Bizerte. Des précaires, mais aussi des syndicalistes, des étudiants, de simples citoyens parisiens ont établi des contacts avec la population tunisienne depuis longtemps. Au lieu de considérer à juste titre cette solidarité réelle de nombre de vos concitoyens envers la Tunisie, et sans connaître rien de toute la richesse de leurs appartenances, vous préférez les ranger sous des étiquettes obscures et méprisantes.
Les occupations, dans ce contexte d'urgence, vont bien sûr continuer. Le Collectif des Tunisiens de Lampedusa en France s'est déjà trouvé un nouveau lieu de vie dans un gymnase Parisien, ce n'est qu'un début. Ce Collectif, qui fait preuve d'une auto-organisation exemplaire, vous a lui-même déjà signifié son étonnement devant vos méthodes musclées peu en adéquation avec vos phrases bien tournées sur la Tunisie.
Monsieur le Maire, sachez qu’une nouvelle phase historique vient de commencer dans laquelle les actes des hommes politiques seront jugés sans concession. Toute Révolution remet en cause les frontières, les lois et ouvre dans son sillage de nouvelles perspectives de justice, d’égalité et de liberté. Prenez-garde de vous mettre trop souvent en travers de ce passage.
Nous avons bonne mémoire.
FRONT DE LIBERATION POPULAIRE DE LA TUNISIE - Section Paris.
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FLPT. Front de Libération Populaire de la Tunisie
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